Gauchiste primaire ?

Un élan semble se dessiner pour dépasser les divisions qui font régulièrement les choux (très) gras des médias, afin de désigner le candidat de la gauche aux présidentielles, autour d’un programme à clarifier et définir, ensemble. On appelle cela des primaires.

Certains à gauche, dont le ténor de mon propre parti, Monsieur Mélenchon, s’y opposent. Je suis désolé d’être en contradiction avec le Parti de Gauche (encore qu’il n’y ait pas eu de vote en interne sur le sujet, et Monsieur Mélenchon ne parle donc qu’en son seul nom, à ma connaissance), mais en y réfléchissant bien, examinant dans le détail mes propres priorités, je considère que ce qu’il y a de plus important dans le cas présent, en politique, c’est de battre Sarkozy et la droite, certes. Mais cela, on pourrait y parvenir avec un candidat du centre ou de la démocratie chrétienne, comme les Bayrou, Villepin et autre…

Mais l’une de mes autres priorités, que je pense partagée, c’est aussi de lutter contre cette logique libérale qui consiste (sous la pression d’un dumping social mondialisé qui donne les effets que chacun peut constater), à démanteler un à un tous nos acquis sociaux, tous nos droits fondamentaux, tous les garde-fous longuement obtenus autour de nos emplois, toutes nos institutions tutélaires, nos administrations et notre fonction publique. Et comme si cela ne suffisait pas et devenait tellement urgent, de voter récemment en catimini un redécoupage électoral dont on se demande à qui il peut bien profiter… Et en quoi il fait partie des priorités nationales, là où bien d’autres préoccupations alimentent les soucis des français… dont l’emploi, le logement et le pouvoir d’achat, inextricablement liés.

Et comment peut-on prétendre se battre efficacement contre une droite si dure sans une gauche plus forte et plus unie ? Avec seulement les 6,5 % représentés par le front de gauche, éventuellement additionnés aux 3 % du NPA ? Soyons sérieux un instant. Je sais que Monsieur Mélenchon est contre ces primaires parce qu’il estime que c’est au premier tour des présidentielles de faire le tri parmi les candidats. L’argument me semble fallacieux, et surtout dangereux. Face à une droite unie, il faut une gauche qui se rassemble, malgré nos points de désaccord, bien réels, notamment quand à une certaine vision économique : libéraux ? ou pas…

A nous de négocier les critères de ce rassemblement autour d’idées fortes, d’engagements auxquels nous tenons, de points programmatiques précis. J’y inscrirai pour ma part l’un de ceux sur lesquels la gauche a failli par manque de courage depuis plus d’une vingtaine d’années : le vote des étrangers aux élections locales, qui me tient particulièrement à cœur. On ne peut parler de désengagement politique et de travail sur l’abstention électorale sans avoir exploré cette voie là, me semble-t-il. Entre autres, bien sûr…

Bien qu’ayant toujours combattu pour une (vraie) gauche de combat, plus forte, plus ferme, plus engagée pour la défense des droits de l’homme, de la femme, de l’enfant, des travailleurs, des exclus, des étrangers, et des citoyens, une gauche qui ne trempe pas dans la compromission avec des intérêts financiers amoraux que constituent pour moi le libéralisme et le capitalisme, qui n’ont que faire de l’intérêt public comme on peut le percevoir à travers de multiples exemples en ce moment, je considère qu’on ne peut pas non plus se cantonner dans un rôle de simple opposition au risque de se retrouver dans un camp de gaulois retranchés dans un village qui menace de tomber dans une intransigeance et un extrémisme absurde avec un barde qui chante mal et dépourvu qui plus est de potion magique… Alors que les romains eux sont légion.

Je sais que parmi ceux qui me lisent, certains crieront à la trahison ou au positionnement de compromission avec un PS que je ne suis pas le dernier à critiquer. Mais il arrive un moment ou il faut choisir son camp : l’opposition permanente ou la construction collective. Et l’on ne peut bâtir un édifice public en refusant perpétuellement l’aide du cousin honni, simplement parce qu’il mange avec des couverts en argent. ¹

La logique anti-sociale du réformisme actuel de cette droite là, qui non contente d’ingurgiter les électeurs du FN, et qui est en train de phagocyter ceux du MPF et des chasseurs, ne nécessite-t-elle pas que l’on se regroupe pour les contrer efficacement et leur coller une raclée, alors que nous sommes en pleine débâcle ?

A vous de voir… et de voter. Ou pas. Moi, en mon âme et conscience, c’est tout vu.

Reste un problème, technique, mais qu’il s’agit de relativiser : qui votera à ses primaires ? Comment définira-t-on un « sympathisant de gauche » ? Comme l’a dit avec beaucoup de pertinence Hamon ce matin sur France Info, peut importe après tout, car ce sont des primaires ouvertes et on voit mal des sympathisants de droite être très motivés pour ce jeu là…


¹ Avertissement : ceci est un exemple ! Libre à vous d’imaginer d’autres ustensiles permettant de symboliser une gauche que je considère frelatée… (Cf Boeckel, Besson, et tutti qanti)

10 réflexions sur “Gauchiste primaire ?

  1. Mouais… Autant, j’apprécie la rigueur de ton raisonnement et j’arrive à comprendre tes motivations, autant et bien… Je ne peux souscrire à la conclusion qui est la tienne !
    Non, sérieusement c’est pas possible… Comment veux-tu que des partis aussi différents quant à des sujets comme l’Europe et la place du capitalisme dans la société arrivent à s’entendre sur quoi que se soit ?
    Soit, admettons que tout le monde s’asseyent autour d’une table et discutent. Crois-tu vraiment que les trois partis libéraux (Verts, PS, Modem) accepteront de revenir sur l’engagement européen de la France ? Crois-tu vraiment qu’ils accepteront de nationaliser la gestion des richesses communes comme l’eau, le gaz ou l’électricité ? De monter le smic à 1500 € ? Quelle place crois-tu qu’ils feront à nos convictions ?

    Je pense qu’une coalition Vert-PS-Modem, est quelque-chose qui peut tenir la route, politiquement parlant puisqu’ils ont déjà entre eux des points communs. Elle est même capable de battre Sarkozy en 2012 ! Mais ces points qui les relient ne sont pas ceux du PG ! Loin de là !
    Non, le but de tout ce pataquaisse c’est de profiter des voix de la vraie gauche tout en dissolvant ses idées dans un bain bien trop grand…

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  2. Gwendal, je ne vois pas pourquoi le modem serait forcément inclus dans la coalition, ceci d’autant plus qu’il ne le souhaite pas semble-t-il. Par ailleurs, la faille dans ton raisonnement est celle de l’approche du ps : je ne suis pas si sûr que la majorité des militants socialistes (je ne parle pas des éléphants…) soient si libéraux que cela, et que la balance ne penche pas davantage du côté gauche, surtout si l’on débat sur de vraies idées, de vraies valeurs, de vrais axes d’orientation politiques, économiques, sociaux, culturels… que le candidat désigné devra porter. J’ai écrit que j’étais d’accord pour des primaires, je n’ai pas encore dit à quelles conditions ! je suis en train d’y réfléchir et cela fera l’objet d’un autre billet. Car depuis la rédaction de celui-ci, j’ai confronté ma position à celle d’autres personnes et il m’est apparu évident qu’il y avait effectivement des conditions à poser à notre adhésion à cette idée. C’est pourquoi, pour l’instant, l’illustration de ce billet a été inspirée par mon humeur utopique du jour, d’où le rêveur… Mon côté pragmatique s’exprimera plus tard. Patience !

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  3. Scrogneugneu ! Je me disais aussi… Que la base du PS ne soit pas si libéral que ça : Peut-être. Mais ça reste à prouver avec des actes.
    Tu vois, si la même coalition avait été proposé par Hamon à destination de la vraie gauche, et même des verts, je n’aurais sans doute pas dit non… Mais là, c’est quand même des Peillon, Montebourg, Valls dont on parle ! (Et derrière eux, Royal qui tire les ficelles) Je les vois mal faire des concessions sur la doctrine libérale.
    Que le PS se mette au clair avec ses courants et ses idées, et APRÈS on pourra discuter. S‘il y a lieu de discuter…

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  4. Si je peux mettre mon grain de sel… D’accord avec Gwendal : il faut voir qui tire les ficelles. Cette manœuvre cousue de fil blanc et reprise en cœur par les têtes de linottes (ou les pervers…) du journalisme aux ordres, est le meilleur moyen d’occuper le terrain, à commencer par l' »université » d’été de La Rochelle. Tout le monde regarde le doigt, aulieu de regarder la lune. Il pourra se faire à La Rochelle autant de travail que l’on voudra sur les idées, les projets, tout sera pollué par la question de « la-candidature-à-gauche ». C’est vraiment mettre la charrue avant les bœufs…
    Non, il ne faut pas transiger sur le corpus d’idées. C’est la force d’attraction du PG. Elle est considérable, ne l’oublions pas. Si nous veillons à la démocratie, à la participation des militants à l’élaboration de notre stratégie, autrement dit, si nous ne nous laissons pas aller à la pente savonneuse de la « représentation » hiérarchisée — on prend les décisions en haut sans en référer en bas… — nous pouvons attirer encore plus de monde que ce que nous sommes aujourd’hui. Ça demande de la rigueur… et de la patience. Ça nous fera une belle jambe, si en 2012 nous avons Prodi au lieu de Berlusconi… Vous connaissez la suite.
    Je ne vois pas un président « de gauche » (Ségolène ? DSK ? Bayrou ?) faire une autre politique que la merde dans laquelle nous sommes plongés. Elle sera juste un peu moins caricaturale. Et partant, peut-être encore plus pénible à combattre… Cette « gauche » qui se déchire pour savoir qui prendra le pouvoir, nous la connaissons depuis longtemps. Nous connaissons son inlassable capacité de trahison. Nous ne pouvons compter que sur nous.

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  5. Je continue mon commentaire ; je l’ai coupé pour ne pas être trop longue, et aussi parce que c’est un point particulier que je veux mettre en évidence ici.
    Je crois que la capacité d’entraînement que porte le PG déplaît beaucoup « en haut lieu ». J’ai eu l’occasion de répondre à un sondage d’Opinion Way. Et là, je vais simplement reprendre ce que j’ai écrit il y a quelques jours à une quinzaine de militants PG, puis à Jean-Luc Mélenchon (ou plutôt à son mail au PG ; je ne sais s’il le consulte fréquemment). J’ai été consternée de ne recevoir aucune réaction. Certes le mois d’août n’est pas fini ; mais quand même.
    Alors voici ce que j’écrivais :

     » Je viens de perdre 10 minutes sur un sondage débile dont la première question était : l’événement politique qui vous a le plus marqué cette semaine. J’ai répondu que c’était la manip sondagière par laquelle on voulait nous faire croire que 1. DSK est de gauche ; 2. Que les Français soupirent après lui.

     » Manifestement ce n’était pas la réponse attendue puisque les questions suivantes portaient toutes sur la manip médiatico-politico-pharmaceutique de la grippe dite « A » (sans autre précision, quels glands !). Je m’en suis sortie vaille que vaille — je ne voulais pas « sauter en marche », la fin des sondages Opinion Way étant souvent assez marrante — en cochant les réponses les plus proches de mon indifférence (la rubrique « je m’en tape » ne figurant jamais… au mieux, on a « ne sais pas », puisqu’ils croient n’interroger que des cons et des malcomprenants). J’ai eu deux fois l’occasion d’écrire à la rubrique *autre : « manip communicationnelle pour nous focaliser sur autre chose que la crise », et « service rendu par le pouvoir politique à BigPharma.Ltd, SARL, etc. » (je cite de mémoire car on ne peut jamais revenir en arrière sur ces saloperies de sondages).

     » Et là, apothéose, je me pince, c’est trop beau, je ne suis pas paranoïaque, je fais une capture d’écran et je vous la livre en pièce jointe… (commentaire actuel : je ne peux pas la livrer ici, mais Gauche de Combat peut me la demander par mon adresse e-mail)

     » À la question : « de quelle formation politique vous sentez-vous le plus proche ou disons le moins éloigné », j’ai répondu « aucune », ce qui est un peu inexact, mais j’avais « squeezé » la seconde partie de la question, obnubilée que j’étais par … l’absence du PG. C’est tellement gros que j’ai fait la capture d’écran… comme ça vous verrez les autres partis. Je voudrais pas dire, mais il ne manque que le PT… et nous !

     » Nihous parti à la soupe ? son parti est encore là ! « Pour la France », à genoux, taillant des p… à Sarko ? il est sur la photo ! T’es pas d’accord avec Duflot ? t’as le choix d' »un autre mouvement écologiste »… Même le MNR qui est encore là…

     » D’une façon ou d’une autre, il faut faire un max de publicité à cette capture d’écran !  »

    Voilà : quand Opinion Way fait un sondage politique (payé par l’Élysée ?), il « oublie » le PG. Il me semble qu’il faudrait reprendre cette info…

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  6. Bonjour. Je voudrais rappeler qu’au dernier congrès du PS, le courant de gauche du parti n’a fait que 20% des votes sur les motions, donc 8O% des membres du Parti Socialiste n’étaient pas opposés à une politique social-démocrate. Par ailleurs, je connais plusieurs vieux adhérents qui en sont partis depuis, dégoûtés par l’orientation que semblait prendre leur parti. Aussi, quel espoir pouvons-nous trouver dans l’élaboration d’un programme commun avec le PS ?
    Le noeud du problème est toujours présent : c’est le choix entre le libéralisme non réglementé (appelé hypocritement « la concurrence libre et non faussée ») qui est un des piliers de l’U.E., ou bien une politique de gauche, progressiste, en faveur du peuple, qui ne pourra pas exister sans une remise en cause des traités européens. Le PS, en trahissant majoritairement le vote des citoyens sur le traité de Lisbonne, a choisi définitivement.
    Quant à nous, militants du PG, c’est la Gauche que nous trahirions si nous acceptions de participer à la comédie tragique qu’ont concoctée les sociaux-libéraux verts et « faux » socialistes. Ceux qui s’engagent ont des valeurs et des convictions ; les sympathisants sont plus influençables et malléables. En les faisant voter pour la candidature, les dirigeants socialistes, et d’abord les plus droitiers d’entre eux, ont choisi une stratégie qui peut sembler devoir être efficace.
    Nous, militants du PG, notre devoir consistera essentiellement à faire de la pédagogie, à expliquer à nos concitoyens où sont leurs intérêts, à faire de l’information, et aussi à garder vivante l’idée de gauche, je dirai même l’identité de la Gauche.

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  7. C’est vrai – indéniablement – quelque chose bouge au PS mais contrairement à ce qu’on croit, ce ne sont pas les forces internes du PS qui poussent à lui faire remuer le popotin: c’est le rapport des forces dans le Pays qui l’y contraint.

    Et le PS – à moins d’etre doublé par les Verts ou les Rouges – a plutôt intérêt à tenir compte de ces forces sociales peu ou pas représentées, frappées de plein fouet par la crise s’il veut (sur)vivre.

    Quant à savoir ce qui va sortir de ce Parti (incontournable pour l’Union des forces de Gauche), BiBi a bien peur que les forces « modérées » feront blocus pour éviter toute alliance avec les courants de la vraie Gauche.
    BiBi a peur mais espère se tromper.

    Voir pour les forces à l’oeuvre au PS son article :
    http://www.pensezbibi.com/pensees-politiques/le-parti-socialiste-enfin-a-gauche-1258

    A bibientôt, Camarade

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