Je ne mange pas de ce pain là.

Dans certains milieux certainement politiquement plus corrects que celui que je me suis choisi, il est de bon ton de plaider pour la tolérance entre gens de bords différents.

 Ainsi, je me souviens de la discussion que j’ai eue avec mon fils sur le fait que Minc soit un ami de longue date de Martine Aubry, que mon gamin soutient. Moi pas. Comment en effet ne pas être effleuré par le doute quant aux convictions profondes d’un homme (ou d’une femme) de gauche qui dîne régulièrement avec un mentor de Sarkozy, sans s’imaginer qu’à un moment ou un autre le risque est grand qu’il (elle) soit influencé(e) par ses idées ? Et sans penser surtout que ce genre de promiscuité peut éventuellement expliquer le caractère poreux de la frontière entre droite et gauche qui nous a valu ces navrants transfuges au gouvernement ?  Sans parler des conséquences désastreuses (votes extrêmes, abstention, discours du style « tous pourris ! ») que ce genre de choses produit sur le commun des mortels.

 Je partage donc tout à fait le point de vue de Bibi, qui nous fait découvrir, par delà les fameux dîners du Siècle qui défraient la chronique mondaine, ceux de l’Atlantique, nettement plus exclusifs :

 « Il serait faux de croire à la futilité de ces Rendez-vous mondains. Il serait tout aussi  idiot de s’en moquer et d’en railler les participants. Bien au contraire, ces cérémonies rituelles sont à prendre très au sérieux : c’est là une des façons pour la classe dominante (avec aussi les mariages «consanguins» et les héritages donnés aux fils et filles) d’assurer la cohésion des Dominants. » (source ici)

 On n’est pas là dans le petit cercle familial de Juan, qui peut dîner avec qui il veut en privé. Même des sarkozystes si cela lui plait. Moi, j’avoue assez facilement être moins tolérant, j’éviterais leur compagnie si elle se révélait trop durable. Plus envie d’être emmerdé par des cons à mon âge, qui vont me bassiner avec leur conception de l’identité nationale ou de la réussite individuelle comme facteur d’évolution indépassable, même si c’est par une habile propension à l’allusion et aux exemples autour desquels on suggère une certaine forme de conception du monde. Que j’exècre.

 Dans mon monde, ce que l’on privilégie, c’est l’être humain. Pas le pognon et la (pseudo) réussite, assise le plus souvent sur une forme de domination. Voire d’écrasement de l’autre. Qui m’insupporte. Avec ou sans petits fours.

 Je ne mange pas de ce pain là. Et rien qu’à entendre l’esquisse d’une velléité de racisme dans une discussion même (surtout !) familiale me donne envie de cogner sur tout ce qui bouge. Même quand cela est dit sur le ton le plus civilisé qui soit…

 Vous êtes prévenus.

18 réflexions sur “Je ne mange pas de ce pain là.

  1. Que des personnes de droite et de gauche se fréquentent, pourquoi pas ? Elles peuvent toujours échanger et pas forcément exclusivement sur la politique.

    Moi, ce qui me dérange, c’est la proximité entre certains journalistes et les hommes politiques… parce que ça peut rejaillir sur la façon d’informer. Je te conseille d’aller voir Fin de concession.

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  2. Comme l’a dit Juan : le melange journaliste / politique = berk et dangereux, sur l’indépendance des médias.

    ensuite que se dit il dans dans ces diners où on interdit même à un sénateur UMP de prendre des vidéos ? c’est la le problème de fond : absence de transparence , donc risque pour la démocratie.

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  3. Bonjour cher Camarade,
    Je viens de mettre en ligne la seconde partie du Diner de l’Atlantique et de conter par le « menu »… détail ma présence auprès de ce gratin bien gratiné.
    Excusez- moi chers lecteurs et lectrices pour les aigreurs d’estomac qui suivront votre lecture…
    Encore une précision : l’Heureux Felix a probablement lu les articles-BiBi sur ses Diners et il a choisi – contrairement à la publicité sur son blog – de… délocaliser son prochain repas à Casablanca ( au lieu de rester à Paris). Aurait-il peur que Pierre Carles vienne faire un tour avec ses caméras ? A suivre au-delà du dessert.

    http://bit.ly/98RLy6

    http://bit.ly/bVwH9U

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  4. Je suis entièrement d’accord avec toi et avec Bibi, « cohésion des dominants », absolument
    étiquette droite ou étiquette « gauche », caste dominante sans aucun doute!
    déconnectés d’une réalité qui de toute façon ne les intéresse qu’en terme de pouvoir.

    « Plus envie d’être emmerdé par des cons à mon âge, qui vont me bassiner avec leur conception de l’identité nationale ou de la réussite individuelle comme facteur d’évolution indépassable, même si c’est par une habile propension à l’allusion et aux exemples autour desquels on suggère une certaine forme de conception du monde. Que j’exècre. »
    Idem!
    et aussi en ce qui concerne les propos racistes!

    « Dans mon monde, ce que l’on privilégie, c’est l’être humain.  »
    yeeeesss!

    Franchement, la pensée molle de gauche, celles de droite et d’extrême droite, les deux ayant tendance à se fondre l’une dans l’autre ces derniers temps, je les observe de loin sur Internet, je les entends s’exprimer chez le boucher (chez l’épicier aussi d’ailleurs) et ça me suffit!

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  5. @dpp : je ne suis pas ennemi de la discussion (on ne peut guère dans ce cas parler d’échange) même avec des gens d’extrême-droite. Les éviter et les ostraciser ne les fait en effet pas évoluer. Mais de là à manger avec eux… BeurK.

    @dagrouik (tiens, je croyais que tu ne voulais plus de ce pseduo ?) : dacodac (et merci d’être venu).

    @bibi : j’ai lu en effet la deuxième aprtie peu après avoir publié ce billet….

    @Céleste : je suis d’accord sur la fin… mais je m’astreins cependant de temps à autre à forcer ma nature, et je m’efforce d’aller au front. Histoire de parfaire mes arguments et ma réactivité. En effet, la frontière entre l’UMP et le FN est parfois bien ténue. Pourquoi croyez vous Messieurs dames que les actes racistes se multiplient de plus en plus ouvertement et sans aucune gêne ? (derièrement le saccage des tombes à Bar le Duc…). Puisque certains membres du gouvernement montrent le mauvais exemple, certains (non) citoyens se sentent autorisés à dire n’importe quoi.

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  6. revenez malgré tout à une réalité : tous les députés et sénateurs se cotoient chaque jour, de tous bords, ils se tutoient tous car « le personnel » ne se renouvelle pas ils sont là depuis bof …30 ans ?

    cependant moi non plus je ne supporte aucun propos raciste dans mon quotidien, s’il m’est demandé mon avis je m’abstiens même de dire « je ne suis pas raciste » car ce début de phrase comporte en général une suite « mais… » alors je dis maintenant « je m’en fous de l’origine de quelqu’un », mais les gens n’ont pas l’habitude et me font répéter…je répète volontiers la même formule, et rajoute « c’est ce qu’est la personne qui compte ».

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  7. Je viens de répondre à Juan dans les Coulisses de Sarkofrance qui ne voit dans ces diners que des diners comme il en connait dans son milieu. Je n’en reviens pas d’une telle analyse et d’une telle naïveté ! Pour lui, le Diner du Siècle est un « machin mondain où l’on cause et puis c’est tout ». Juste un petit truc entre soi où les paroles et les échanges ne sont pas si importants.

    Tiens je te file ma conclusion :

    « Bien entendu, ça ne fait pas vraiment plaisir aux gens de « Gauche » de rappeler que les Aubry, DSK, Fabius en font partie… Aïe, aë, aïe ! Justifieraient-ils leur présence par des « mondanités » ? Je ne le crois pas : c’est là aussi pour eux une alliance « forcée » car ils voient bien que c’est justement ici ( et ailleurs bien entendu mais ICI quand même) dans ce lieu ( il y en a d’autres) que se jouent les liens de pouvoir. »
    A bibientôt

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  8. Martine Aubry a une histoire politique et un tempérament qui montre bien qu’elle n’est pas le genre de personne à se faire imposer directement ou non un positionnement.

    Qui a soutenu Aubry lorsqu’elle était la seule à défendre une autre société que celle fondée sur l’argent, ce qu’elle nomme la société du Care ? Pas grand monde même à gauche, idem lorsqu’elle a défendu une régularisation large des sans papiers ou l’adoption et le mariage par les couples de même sexe. Est ce que ca ce sont des positions qui pourront être défendus en 2012 par Sarko ? Je ne crois pas. Est ce qui est fait à Lille c’est une politique qui a un rapport avec Minc ? je ne crois pas.

    Lorsque je vois Mélenchon proposer à DCB sur un plateau de faire alliance pour passer devant le PS je me demande vraiment elle repose sur quoi idéologiquement votre autre gauche dont ce monsieur se réclame implicitement le leader. Même pas besoin d’avoir des amis classés à droite pour trahir ses idéaux, juste une ambition personnelle et un égo démesuré comme Mélenchon. Au moins Aubry a pour elle de ne pas avoir cette maladie là du pouvoir au point qu’elle se présentera même peut être pas et c’est peut être cette humilité que je préfère dans son attitude politique.

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  9. @back2baiscs : je ne risque pas de soutenir Martine Aubry ni le care : c’est une notion empruntée à Tony blair dont on sait ce qu’il a apporté au socialisme… Par ailleurs, cette chose là provient d’un théoricien nommé Adam Smith qui n’est pas inconnu pari les économistes… http://fr.wikipedia.org/wiki/Adam_Smith. C’est l’un des pères du libéralisme… Encore du flou dans les frontières, fils ! CQFD.

    Sur le care :
    http://www.lemonde.fr/politique/article/2010/05/14/la-societe-du-care-de-martine-aubry-fait-debat_1351784_823448.html

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  10. …ce qu’elle développe est un peu plus complexe que ce qui en dit par Valls et NKM. Voilà un début d’analyse:
    http://www.parti-socialiste.fr/articles/le-care-acte-i
    ou là:
    http://www.lemonde.fr/politique/article/2010/04/14/martine-aubry-cherche-a-redynamiser-la-pensee-sociale-progressiste_1333411_823448.html

    Réduire le Care à Blaire ou Adama Smith c’est comme réduire la redistribution des richesses à Staline, ca a vraiment aucun sens.

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  11. C’est marrant des « sarkozystes » j’en connais pas, à croire qu’ils se cachent… A se demander même si ça existe encore, si oui c’est peut-être pas tout à fait des êtres humains, genre l’auriculaire tendu l’air de rien et peau de lézard dessous…

    Si en fait, à la manif du 19/10 une vieille dame africaine qui sortait de l’hosto me demande de la raccompagner à son hôtel place d’Italie (pile d’où partait la manif c’était un énorme bazar avec fumigènes etc.) : presque arrivés elle m’a avoué qu’au début elle aimait bien Sarkozy, mais que quand il a changé de femme là c’est pas passé du tout. Une ancienne sarkozyste donc, ça c’est acceptable.

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  12. « Dans mon monde, ce que l’on privilégie, c’est l’être humain. Pas le pognon et la (pseudo) réussite, assise le plus souvent sur une forme de domination. Voire d’écrasement de l’autre. Qui m’insupporte. Avec ou sans petits fours. »

    GdC, je te rejoins 10 sur 5. La compétition érigée en mode de vie, très peu pour moi ! La réussite se fait TOUJOURS aux dépens de quelqu’un, bien que la doxa insiste sur l’inverse. C’est bien pourquoi le capitalisme vise le toujours plus, afin d’agrandir le gâteau et d’appâter les gogos en leur faisant croire qu’ainsi ils en auront une part. Le capitalisme est fondamentalement inégalitaire, privilégiant les plus dénués de scrupules face aux tenants du partage équitable. Le PDG de la plus grande firme du monde est aussi remplaçable, voire nettement plus, que l’artisan de quartier qui sait faire des merveilles avec pas grand-chose : sa rémunération dix mille fois supérieure ne peut se justifier en rien. Rien.
    Quand les salauds se croient inamovibles, les Mozart des cités claquent des dents.

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  13. Tres bien dit babelouest, surtout que ceux qui gagnent le plus de fric sont des vendeurs de vides et ceux qui font travailler les autres ou les adminstrent avec de grands airs charitables.

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  14. Marx n’est mort que pour les gens qu’il dérange… C’est à dire la plus grande partie de la classe dominante, qui s’impose même dans nos sociétés occidentales dites démocratiques par la violence, une violence souvent symbolique soit, mais qui n’en génère pas moins beaucoup de souffrances. Mais cette violence là, elle est plus que tolérée dans notre société, elle est accéptée car déniée.
    Comme les aristos, ceux qui détiennent le pouvoir et l’argent (si tant est que l’on puisse dissocier les deux…) se reproduisent entre eux. On peut y voir de la collusion ou même pire, une sorte d’eugénisme de classe, que l’on trouve tout aussi bien chez les capitalistes de droite que de gauche… Mais aller, faisons le pari que les mécanismes sous-jacents qui régissent ce comprtement sont de l’ordre de l’inconscient au sens Freudien du terme, celui qui nous echappe… Mais j’ai quand même du mal à y croire… La volonté d’exercer le pouvoir est toujours suspecte, même dans le cadre d’une relation d’aide et même s’il y a des nuances. Ce qui me laisse à penser qu’elle l’est tout autant chez les socialos riches et embourgeoisés que chez les représentants de l’UMP.

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