Hollande préfère-t-il s’adresser aux électeurs du FN plutôt qu’à ceux du Front de Gauche ?

Quand on se réclame vraiment de gauche, je comprends que ce genre de Une puisse rendre vert… de rage. Pour la plupart, nous avons combattu pied à pied, argument contre argument, sans relâche, avec constance et fermeté, démantelé et décortiqué une à une  les attaques du Front National et de ses adeptes. Nous nous sommes élevé contre sa banalisation grandissante. Pour certains, nous avons même souhaité, voire milité pour son interdiction, comme cela est  mon cas, considérant qu’il ne s’agissait pas d’un parti démocratique, qui violait les lois de la République. Pour d’autres, nous sommes allés les débusquer jusque dans leur tanière, pour voir ce qu’ils avaient dans le ventre, quels étaient leurs arguments, et avons bien vu qu’ils étaient assez vite à court au point de passer très rapidement à l’insulte, à la violence, aux menaces de mort, comme ce fut le cas pour moi ici. Chez nous, on appelle cela la stratégie du Front contre Front, avec sur twitter un hashtag approprié : #frontcontrefront. Si l’on veut élargir la recherche et prolonger l’action au delà du réseau Front de Gauche, c’est #antifa.

Face à nous, avant le premier tour, jouant sur une appartenance commune à une gauche,  le PS a tenté de nous faire le coup du vote utile en agitant la menace du FN devant ceux qui étaient tenté de voter pour le candidat du Front de Gauche, brandissant le spectre d’un 21 avril… qui ne s’est pas produit. Il ne s’est en outre aucunement associé à notre combat contre le FN, pendant lequel nous nous sommes sentis bien seuls,  préférant s’attaquer et calomnier Mélenchon à travers les journaux et sous la plume de journalistes inféodés,   comme Philippe le déplore dans un billet auquel je rends grâce. Il traduit en effet en partie le (re)sentiment de bien des électeurs du front de Gauche, plutôt amers et remontés sur le sujet.

Aussi, après ces péripéties de campagne, voir à présent Hollande s’adresser directement aux électeurs du FN alors que nous les avons tant combattu ne peut que provoquer de la colère, ou pour le moins une grande incompréhension. Monsieur le candidat « socialiste », auriez vous plus de choses à leur vendre qu’à nous-mêmes, avec qui vous avez refusé le débat ?

Et dire qu’on se moque de Sarkozy, de faire  le grand écart  entre Bayrou et Le Pen. Mais finalement, Hollande,  c’est bien un peu pareil… Bien qu’il soit probable que les fanatiques hollandais tenteront de nous persuader du contraire, nous démontreront par A+B que leur candidat est le meilleur et possède contrairement aux propos de ses détracteurs la stature d’un chef d’état puisqu’il se place au dessus des positionnements partisans etc etc etc… L’histoire du berger, on me l’a déjà faite. Je ne suis pas de cette génération qui n’a pas connu la gauche. Là, c’était Mitterand. Nous en sommes revenus… Plus jamais ça.

En outre, commettre l’erreur si commune à gauche de croire que le vote FN est un vote de « perdition sociale » ou d’égarement lié à une souffrance ne correspond pas à ce que je constate en m’adressant à ces électeurs là. Ce pouvait être autrefois le cas, mais il a changé de nature, est devenu un vote d’adhésion, surtout depuis qu’en haut lieu on véhicule également la thèse du choc des civilisations, que dans les médias le FN et la parole à visée discriminante est banalisée. Il suffit de lire le livre de Claire Checcaglini, Bienvenue au front, pour se rendre compte à quel point l’islamophobie est un lien et un liant puissant dans ce parti. Alors, continuez de jouer les hypocrites si cela vous arrange. Mais ce n’est pas la réalité. Et adopter une posture en jouant les grands princes qui daigne s’adresser au bas peuple en prétendant faire revenir au bercail les brebis de gauche égarées est tout simplement ridicule. Cela s’appelle se fourrer le doigt dans l’œil jusqu’au coude. D’autant plus qu’il y a une autre raison pour beaucoup de ces électeurs là de voter pour le FN, que martèle régulièrement Marine Le Pen dans ses meetings : la haine de l’oligarchie (alors qu’elle en fait elle même partie, ce qui est fort de café), et le thème de la corruption et des conflits d’intérêts. Or, je n’ai pas vu que François Hollande en faisaient des thèmes de campagne particuliers, lui qui a fermé les yeux pendant toutes ces années où il était secrétaire du PS sur les dérives claniques et clientélistes de certaines fédérations, ce qui a profité au développement du FN dans au moins deux cas. Il a eu le grand courage de refiler le bébé à son successeur, Martine Aubry, belle preuve de courage…. ça promet.